Ce samedi là, nous devions redescendre de Champsauret, petite station alpine de ski de Haute Provence.
Un pays relativement plat et balayé tous les hivers par le Mistral, ce vent du nord qui glace les os mais qui fait les belles journées en renvoyant les nuages vers la Grande Bleue.
Toute la semaine précédente le temps avait été variable, nuageux le week-end, neigeux en début, beau au milieu mais se couvrant de brume remontant de la vallée tous les après-midi et donnant des journées glaciales (-16°C la nuit, -7°C le jour). Le vendredi après-midi, les brumes envahirent la station dès 15 heures. Des cristaux scintillants illuminaient l'air en se reflétant sous les rayons d'un soleil de plus en plus pâlissant. En début de soirée, la route qui avait retrouvé sa couleur noire dans la journée, se couvrit d'une fine pellicule blanche sur laquelle beaucoup d'autos et de piétons avaient du mal à maintenir une trajectoire rectiligne.
De la fenêtre de notre appartement, notre vue se portait naturellement sur la route et nous ne rations rien du spectacle offert par des automobilistes ne dosant pas leur pression sur l'accélérateur et dont les moteurs en sur-régime faisaient perdre l'adhérence aux roues. De rares piétons, emmitouflés dans leur bonnet en fourrure, leur anorak et leurs bottes, se hâtaient prudemment de regagner leur résidence. Seuls quelques bambins essayaient encore de faire des boules avec une neige devenue glace.
La météo du samedi prévoyait -22°C (ressenti-30) mais pas de chute de neige. Nous allions pouvoir partir tranquillement.
Toute la nuit, le vent tourbillonnant avait déposé sur la route et les véhicules une fine couche de neige et de glace, obligeant les automobiliste prudent à chaîner leur véhicule.
Dans la nuit et au lever du jour nous avions entendu et vu passer le véhicule chargé de saler la route, c'est rassurant mais quand le froid est trop vif, peu efficace. Le directeur de la station, monsieur Boudublair-Bronzeski activait son personnel pour indiquer que la route principale avait été dégagée et pousser les véhicules en difficultés dans la seule montée conduisant vers la sortie de la ville.
Dilemme : fallait-il mettre les chaines sur le véhicule tant que nous étions au sec dans le garage en sous-sol ou valait-il mieux attendre d'être dans la rue, au moment où elles seraient utiles. La réponse nous fut vite donnée par l'observation des précédents conducteurs qui ne pouvaient pas gravir la dernière rampe de sortie du garage, leurs chaînes dérapant sur le béton, chauffant et même se rompant pour un automobiliste du Nord trop pressé de partir.
Dès la sortie du garage nous étions dans le bain. Des véhicules arrêtés partout, des conducteurs maladroits dans le placement de leurs chaines, des touristes arrivant s'impatientant et ceux partant s'énervant. Et dire qu'il n'y avait que 15 kilomètres de descente avant d'atteindre la route de la plaine !
Par bonheur, lors de mon dernier changement de pneumatiques j'avais opté pour des pneus "pluie" n'ayant pas l'usage régulier de pneus "neige" et une paire de chaînes à neige se trouvaient dans le coffre du mon véhicule.
Sagement nous avons attendu que la température se réchauffe, relativement car à 10 heures il faisait encore -16°C. Les précédents passages ayant dégagé un double sillon noir, nous nous mettons en route, sans chaînes, et en suivant à bonne distance les autres véhicules. La traversée de la station se fit sans encombre malgré la présence d'un véhicule en stationnement gênant dans un virage. La descente vers la vallée fut une suite de glissades pour certains véhicules du long serpent ondulant au gré des lacets. Sous un pâle soleil, nous ne pouvions distinguer qu'au dernier moment si les plaques blanches au sol étaient du sel ou de la glace et les imprudents improvisaient des figures non apprises à l'auto-école.
Radio-Trafic ne nous donne pas des nouvelles rassurantes : des chutes de neige importantes sont prévues sur la région de Toulon, les conducteurs sont invités à ne pas prendre la route sauf nécessité, plusieurs départements sont en alerté météo.
Enfin nous avons rejoint la Route Napoléon, nationale très fréquentée où nous pensions à tort que nos ennuis seraient terminés. Dans la montée du col Bayard le vent glacial et latéral faisait raser la chaussée par des plaques de neige qui anéantissait le travail des services de déneigement. Malgré cela, des conducteurs locaux (j'ai envie d'écrire à l'espagnole "locos"), sans doute sans peur, mais pas sans reproches effectuaient des dépassements, y compris dans des lacets à faible visibilité. Par bonheur je n'en ai vu aucun planté dans le décor. Pour ma part, ne connaissant pas la route, je roulais à 70 km/h maxi, pas pressé mais décidé à arriver. A Gap un petit degré de température extérieure et de la neige sur les trottoirs. Celle-ci sera toujours présente sur les accotements jusqu'à Aix en Provence. Le Mistral nous enverra ses rafales pour nous rappeler sa présence et que nous sommes au mois de février. Sur les autoroutes les messages rappellent l'alerte météo neige et invitent à écouter leur radio qui n'arrête pas de rappeler que la priorité est due aux engins de déneigement, pas très rassurant tout ça! Heureusement qu'entre deux infos ils passent un peu de musique jazzy ça détend.
A notre arrivée à Brume-sur-l'Etang, surprises : la température extérieure est de 5°C, celle de la maison 6,5°C. Nous avions éteint le chauffage huit jours plus tôt en nous disant que décidément, il n'y avait pas eu d'hiver. Les canaris n'ont pas gelé dans leur cage, les plantes extérieures pendent lamentablement le long de leur pot. Et nous voilà assis près de la cheminée, couverts d'un bonnet, comme deux santons, à attendre que les actions combinées du bois et de la chaudière fasse remonter le mercure à 16°C avant d'aller s'enfouir sous la couette dans des draps encore glacés.
Dans la nuit la température baisse jusqu'à -6°C et au matin plus d'eau au robinet, le compteur à gelé. Heureusement qu'un petit chauffage à l'aide d'un sèche-cheveux a été suffisant pour rétablir l'écoulement.
Aujourd'hui le soleil brille, le vent souffle fort, et même si à l'ombre la température est encore négative, nous espérons en avoir fini avec cet épisode glacial qui a touché toute l'Europe.
Qui a dit que le trou dans la couche d'ozone créait un réchauffement de la planète ?
(Les noms de certains lieux et personnes ont été volontairement changés et les faits sont réels, quelquefois partiellement exagérés)
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