Un Jurançon 93
Aux couleurs du maïs,
Et ma mie, et l’air du pays:
Que mon cœur était aise.
Ah, les vignes de Jurançon,
Se sont-elles fanées,
Comme ont fait mes belles années,
Et mon bel échanson?
Dessous les tonnelles fleuries
Ne reviendrez-vous point
À l’heure où Pau blanchit au loin
Par delà les prairies?
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L’immortelle, et l’œillet de mer
Qui pousse dans le sable,
La pervenche trop périssable,
Ou ce fenouil amer
Qui craquait sous la dent des chèvres,
Ne vous en souvient-il,
Ni de la brise au sel subtil
Qui nous brûlait aux lèvres?
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J’ai vu le Diable, l’autre nuit;
Et, dessous sa pelure,
Il n’est pas aisé de conclure
S’il faut dire: Elle, ou: Lui.
Sa gorge, avait l’air sous la faille,
De trembler de désir:
Tel, aux mains près de le saisir,
Un bel oiseau défaille.
Telle, à la soif, dans Blidah bleu,
S’offre la pomme douce;
Ou bien l’orange, sous la mousse,
Lorsque tout bas il pleut.
«Ah!» dit Satan, et le silence
Frémissait à sa voix,
«Ils ne tombent pas tous, tu vois,
Les fruits de la Science».
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Pour une dame imaginaire
Aux yeux couleur du temps,
J’ai rimé longtemps, bien longtemps:
J’en étais poitrinaire.
Quand vint un jour où, tout à coup,
Nous rimâmes ensemble.
Rien que d’y penser, il me semble
Que j’ai la corde au cou.
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Toute allégresse a son défaut
Et se brise elle-même.
Si vous voulez que je vous aime,
Ne riez pas trop haut.
C’est à voix basse qu’on enchante
Sous la cendre d’hiver
Ce cœur, pareil au feu couvert,
Qui se consume et chante.
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